Préface
Cet ouvrage est issu d’une exposition itinérante inaugurée à Corte et présentée sur le site de Capula, haut lieu de la mémoire médiévale insulaire, dans le cadre du projet Sapè de l'Université de Corse, durant l'été 2021. Il se fonde sur une vingtaine d'années de recherches menées à l'Université de Corse au sein du laboratoire "Lieux Identités eSpaces Activités" (UMR CNRS 6240 LISA) et s'inscrit dans le cadre du projet Les Espaces de la Corse Médiévale codirigé par Vannina Marchi van Cauwelaert et Jean-André Cancellieri. Articulé autour de l'édition numérique et scientifique de la Chronique de Giovanni della Grossa, ce projet de recherche bénéficie du soutien de la Collectivité de Corse et du Fonds européen de développement régional.
Empruntée à Pierre Nora, la notion de « lieu de mémoire » renvoie ici tout autant à la construction d’une mémoire mythique du Moyen Âge corse, transmise depuis le XVe siècle par la Chronique de Giovanni della Grossa, la tradition orale et la toponymie, qu’aux nombreuses traces matérielles que cette période a laissées dans les paysages insulaires et dont la mémoire s’est peu à peu effacée.
Définir les « lieux de mémoire de la Corse médiévale » revient ainsi, d’une part, à décrypter la force symbolique des mythes et des légendes associés à la période, tout en reconstituant l’histoire de leur élaboration depuis le XVe siècle ; d’autre part, à identifier des lieux, des symboles et des acteurs sociaux constitutifs d’un patrimoine médiéval à valoriser.
Il s’agit donc d’analyser le système de représentations des Corses du Moyen Âge et leur « culture historique », dans un contexte dominé par la mémoire orale et l’absence d’archives locales ; de replacer la Corse médiévale dans l’espace méditerranéen, en croisant toutes les sources à notre disposition (chroniques, vestiges et objets archéologiques, documents d’archives, œuvres d’art) ; de valoriser l’histoire médiévale de la Corse à travers des lieux emblématiques dans une perspective de patrimonialisation.
L’ouvrage permet ainsi de cheminer à travers les paysages médiévaux de l’île et de découvrir les hommes, les objets, les archives, les œuvres d’art et les légendes qui y sont rattachés, selon un itinéraire qui s’articule autour de trois thématiques : traces matérielles, figures humaines et héroïques, traces symboliques.
L’ambition de ses auteurs n’est autre que d’éveiller l’intérêt du lecteur à l’égard d’une Corse médiévale qui, en dépit de sa valeur patrimoniale, demeure encore largement méconnue, en proposant une introduction synthétique et richement illustrée aux principales problématiques que soulève son étude.
Il constitue ainsi le premier volume d’une nouvelle collection intitulée « Bibliothèque de la Corse médiévale » dont la vocation est de concilier rigueur scientifique et accessibilité à un large public afin de diffuser les connaissances les plus récentes sur cette période charnière qui vit la formation des paysages contemporains.
Sommaire
« Lieux de mémoire », le témoignage des cartes
Que reste-t-il du Moyen Âge aujourd’hui en Corse ?
Traces matérielles
La christianisation de la Corse
L’empreinte pisane
L’influence franciscaine : les Giovannali
Les fresques, traces picturales de la pastorale franciscaine
Les retables, l’insertion de la Corse au sein des courants artistiques méditerranéens
L’habitat villageois
Les notables villageois
Les châteaux
L’empreinte urbaine génoise
Bastia et Ajaccio, une nouvelle urbanisation à la fin du Moyen Âge
Les officiers génois
Figures humaines et héroïques
Giovanni della Grossa (1388-1464), un « lettré » corse
La Chronique, l’histoire des manuscrits
La Chronique, une vision interne sur la Corse médiévale
Giudice di Cinarca (Sinucello della Rocca, 1213-1304), la « Seigneurie » de Corse
Sambucuccio d’Alando (premier tiers – dernier tiers du XIVe s.), la « Commune » de Corse
Arrigo della Rocca (second quart du XIVe siècle – 1401), le premier comte de Corse
Vincentello d’Istria (dernier tiers du XIVe siècle – 1434), la Corse aragonaise
Giampaolo di Leca (vers 1450-1515), Les premiers frémissements d’une nation corse ?
Rinuccio della Rocca (milieu XVe – 1515), le dernier des Cinarchesi
Figures féminines populaires
Figures féminines aristocratiques
Traces symboliques
Héros légendaires : Ugo Colonna et Arrigo Bel Messer
Héros légendaires : « Orsalamanu » et le Conti Pazzu
Symboles et emblèmes de la Corse : la tête de Maure
Symboles et emblèmes de la Corse : les armoiries cinarchesi
Symboles et emblèmes de Gênes
Les lieux de vedute (assemblées)
Sources et bibliographie
Les auteurs
Agrégé d’histoire, ancien membre de l’Ecole française de Rome, Jean-André Cancellieri est professeur émérite d’histoire médiévale à l’université de Corse. Auteur de plusieurs ouvrages (Bonifacio au Moyen Âge. Entre Gênes, Corse, Sardaigne et Méditerranée, Ajaccio, CRDP, 1997; De la nature à l'histoire. Les forêts de la Corse, Ajaccio, Piazzola, 2004) et de nombreux articles scientifiques, il a dirigé plus d’une dizaine de thèses et une trentaine de masters sur la Corse médiévale.
Maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Corse, directrice adjointe du laboratoire CNRS Lieux Identités eSpaces Activités, Vannina Marchi van Cauwelaert a écrit plusieurs ouvrages sur la Corse médiévale (Rinuccio della Rocca. Vie et mort d’un seigneur corse à l’époque de la construction de l’Etat moderne, Ajaccio, Colonna, 2005; La Corse génoise (milieu XVe-déb. XVIe s.). Saint Georges, vainqueur des « Tyrans », Paris, Classiques Garnier, 2011) et de nombreux articles scientifiques. Elle dirige actuellement avec Jean-André Cancellieri, le programme de recherche ECM - les Espaces de la Corse Médiévale cofinancé par la Collectivité de Corse et le Fonds Européen de Développement Régional.
Que reste t-il du Moyen Âge en Corse ? Réponses en images.